DOSSIER Occasion, Opticiens mobiles, Éco-conception : Quand l’optique emprunte d’autres chemins
L’essor d’une mondialisation sans limite, la crise sanitaire, l’inflation galopante poussent les professionnels, salariés comme indépendants, à se réinventer. Que ce soit pour donner un sens à son métier, faire des économies, retrouver le goût du service ou échapper à la routine, on cherche de nouvelles solutions. Elles peuvent être organisationnelles, logistiques, managériales, basées sur des convictions et principes plus importants à nos yeux que le seul salaire. Dans le secteur optique, on n’échappe pas à cette révolution. Depuis quelques mois, des tendances se sont affirmées. Certains ont décidé d’être acteurs de leur propres destins. Alors, ils ont pensé l’optique autrement. Seconde main, opticiens mobiles, fabrication écologique, toutes les idées sont sur la table, et souvent bien menées.
Opticiens mobiles : le service avant tout
Se recentrer sur la relation avec le client. Voilà le crédo des opticiens mobiles. Le magasin d’optique, bien qu’avantageux sur certains points, n’offre plus toujours satisfaction, et certains opticiens ont parfois l’impression que leur métier n’a plus de sens. Répondre au téléphone lorsqu’on est avec un client, réceptionner une livraison à des moments inopportuns, donner parfois l’illusion de courir de partout, avoir une offre toujours plus grande et peu ciblée…Le parcours client semble en sursis dans l’optique d’aujourd’hui. Les offres elles-mêmes ne donnent pas forcément satisfaction : une deuxième paire trop souvent proposée ou choisie par défaut, sans tenir compte des besoins réels du client.
Parce que la mobilité, ce n’est pas forcément le simple fait de se déplacer, et de proposer son service d’opticiens à ceux qui ne peuvent pas se déplacer. Ce concept a été expérimenté par certaines grande franchises. Si cela a eu le mérite d’aider une population dans son besoin d’assistance, les nouveaux opticiens mobiles cherchent à maximiser le service.
La franchise ou l’opticien qui propose ses services à domicile ne fera qu’une prolongation de son magasin. La nouvelle offre de mobilité est une démarche bien différente. Elle s’affranchit complètement des activités dispensées en magasin, pour devenir un métier à part entière. Jugez plutôt : l’opticien mobile se déplace avec son matériel technique, 150 montures du même fournisseur et au même prix, faisant ainsi s’effondrer les objections de pouvoir d’achat. Au final, l’expérience s’avère concluante. La démarche répond aux seuls besoins du clients, le rôle de l’opticien est recentralisé : il se déplace pour son conseil de professionnel de santé, et rien d’autre.
Quant aux opticiens eux-mêmes, ils sont maîtres de leur temps et de leurs horaires et gagnent en moyenne mieux leur vie qu’en magasin. Aujourd’hui, trois principales entreprises ont fait le pari de la mobilité. Il s’agit des Opticiens Mobiles, de L’Opticien qui Bouge et des Opticiens à Domicile.
Le marché de l’occasion : le boum du futur ?
Pouvoir d’achat et changement climatique sont parmi les principales préoccupations en France et en Europe. Pour pouvoir consommer sans se ruiner ou créer une dépendance plus grande encore au processus de fabrication, une solution semble toute trouvée ! Avec l’émergence et l’explosion des applications comme Vinted ou Le Bon Coin, le marché de l’occasion pèse lourd. Très lourd.
Près de 7,4 milliards d’euros pour être exact. Impossible de passer outre. Bien entendu, dans le secteur optique, difficile de changer de lunettes sans les personnaliser, puisque elles doivent être adaptées. En prime, difficile d’offrir une garantie sur de l’occasion. Et pourtant, certains opticiens s’y sont mis. C’est le cas de Dingue de Lunettes, de la start-up Seecly et de la Lunetterie du Coin, par exemple, qui proposent des montures moins chères, remises en état et remboursables par les mutuelles !
Bien entendu, les montures, pour être remboursables, doivent être achetées chez un opticien agréé. Aussi, il est tout à fait facile de faire varier son offre en proposant une multitude de montures d’occasions. Elles présentent de nombreux avantages : le prix, bien sûr, mais aussi la possibilité de présenter son bagage technique, de proposer des montures très anciennes, dotées d’une véritable histoire, et de mettre en avant une responsabilité environnementale au sein de son entreprise.
Le marché de l’occasion, comme pour les opticiens mobiles, a le vent en poupe. La nouvelle façon de consommer, qui accompagne toujours les crises de la mondialisation, fera certainement la part belle à la seconde main. Et des crises, ce n’est pas ce qui manque en ce moment !
L’Éco-conception : tout redéfinir ?
Fabriquer du neuf peut également s’affranchir des conditions obsolètes de production. C’est le principe de l’éco-conception. Savoir comment et pourquoi utiliser tel ou tel matériau est la responsabilité de tout artisan. Pour cela, il est nécessaire, voire obligatoire, de s’informer, et de financer la recherche et le développement afin de trouver des solutions viables. De nouveaux labels sont d’ailleurs apparus pour tenter de renforcer la responsabilité écologique des acteurs.
L’une de ces solutions a beaucoup fait parler ces dernières semaines : la conception d’un nouveau matériau recyclable pour la fabrication de montures. L’acorium est sorti du laboratoire nantais d’Acuitis. Il est fabriqué à base d’acétate bio et de poudre de cuir au tannage végétal. Entièrement recyclable, il offre en plus un look singulier et vintage grâce à un aspect de cuir vieilli.
Cet exemple de réussite démontre parfaitement la capacité de certains acteurs industriels à offrir de nouvelles perspectives de production, alliant prouesse technologique, respect de l’environnement et réponse à la demande commerciale. Bien sûr, on a hâte de pouvoir déterminer les retombées d’une telle trouvaille.
L’éco-conception de produits optiques vient considérablement rebattre les cartes et redéfinir l’avenir de l’optique. Alors que les différents salons internationaux de l’optique mettent de plus en plus l’accent sur la nécessité de faire grandir des convictions liées à la défense de l’environnement et la lutte contre le changement climatique, il semble que le secteur prenne de plus en plus la bonne direction.
L’optique emprunte des voies qui lui semblaient inaccessibles quelques années en arrière. Cette nouvelle façon de voir le métier, probablement accélérée par les événements qui ont eu lieu depuis quelques années (crises financières, crise sanitaire, crises géopolitiques) montre la formidable agilité du secteur. Bien que l’on s’attende à voir émerger quelques voix s’élevant contre la rédéfinition d’un métier ou un quelconque manque de réalisme, il ne faut pas oublier à la fois que l’échec fait partie de la transformation et qu’un secteur qui ne se transforme pas est un secteur qui ne vit pas.