DOSSIER – Santé Visuelle Mondiale, où en est-on ?
Comme toute problématique de santé, la cécité et la déficience visuelle font partie des préoccupations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Régulièrement, l’agence spécialisée des Nations Unies (ONU) présente les chiffres de la santé visuelle mondiale, ainsi que des plans stratégiques à courts ou moyens termes.
En tant que professionnels de santé visuelle, industriels comme opticiens ont le devoir de s’informer de ce qui est mis en œuvre au niveau global. Ce dossier est donc le moyen de faire un point sur les chiffres dans le monde et en France. Mais aussi sur les causes des maladies oculaires et les plans qui peuvent être élaborés afin de les combattre.
Santé Visuelle Mondiale : l’affaire de tous
Il existe plusieurs centaines de maladies oculaires. Si certaines sont qualifiées de bénignes et n’entraînent pas la moindre déficience visuelle, elles peuvent provoquer des symptômes incommodants. D’autres peuvent malheureusement conduire à une cécité complète et irréversible.
L’OMS met en lumière plusieurs caractéristiques des maladies oculaires, qu’il convient d’associer à un contexte social global. En effet, alors que sur la planète, toutes les classes d’âges (des nourrissons aux personnes âgées) et toutes les classes sociales sont concernées. Les femmes sont autant touchées que les hommes.
Toutefois, l’organisation estime que la pauvreté à un impact sur les causes comme sur les conséquences des déficiences visuelles. En effet, l’accès aux soins est difficile dans certaines régions du monde, et les personnes souffrant de déficience sont, selon un rapport, plus exposés aux abus et à la violence. En prime, la stigmatisation et la discrimination dont ils font l’objet les empêchent de participer et de contribuer à la vie familiale et communautaire sur un pied d’égalité.
L’OMS insiste donc sur la nécessité de ne pas se préoccuper seulement du traitement des maladies oculaires, mais bien d’organiser la prévention via la planification de soins oculaires répondant aux besoins sur tout le globe.
Par ailleurs, le phénomène de la santé visuelle mondiale, ce n’est aussi, comme le suggère l’organisation, « que la pointe visible de l’iceberg des problèmes de vision. » Selon elle, un grand nombre de personnes connaissent des problèmes de vision « sans pour autant avoir atteint un seuil de déficience visuelle bien défini ».
Il existe des maladies qui n’entraînent pas toujours de difficultés alors que d’autres en provoquent sans pour autant avoir franchi à un instant déterminé le seuil de la déficience visuelle.
Des chiffres inquiétants
Dans un premier temps, comment définir la déficience visuelle ?
La Onzième Classification internationale des maladies (CIM-11, 2018) distingue deux groupes distincts de déficiences visuelles. Celles affectant la vision de loin, telle que corrigée, et celles affectant la vision de près, telle que corrigée.
Déficiences affectant la vision de loin:
- légères – acuité visuelle corrigée inférieure à 6/12;
- modérées – acuité visuelle corrigée inférieure à 6/18;
- sévères – acuité visuelle corrigée inférieure à 6/60;
- cécité – acuité visuelle corrigée inférieure à 3/60.
Déficiences affectant la vision de près :
- acuité visuelle inférieure à N6 ou N8 à 40 cm avec la correction existante.
À cela, il faut ajouter différents facteurs car l’expérience individuelle de la déficience visuelle peut différencier d’une personne à l’autre. En effet, la disponibilité des soins, des interventions de prévention et de traitement ou encore l’accès à la réadaptation visuelle (cela concerne les dispositifs optiques mais aussi, par exemple, les cannes pour malvoyants), à l’information ou au transport, sont autant d’impondérables qui auront des conséquences, parfois lourdes, sur les résultats.
À l’échelle globale, en 2020, on estime qu’environ 1,3 milliard de personnes vit avec une forme de déficience de la vision éloignée ou proche.
En vision de loin, 188,5 millions de personnes présentent une déficience visuelle légère et 217 millions une déficience visuelle modérée à sévère, tandis que 36 millions de personnes sont atteintes de cécité. Par ailleurs, 826 millions de personnes vivent avec une déficience affectant la vision de près.
Ces chiffres concernent les pays développés comme ceux en voie de développement. La croissance démographique ainsi que le vieillissement de la population tendent à accroître le risque d’avoir de plus en plus de personnes souffrant de déficience visuelle.
De multiples causes
Il existe de nombreuses causes de déficience visuelle. Les principales étant :
- les erreurs de réfraction non corrigées
- la cataracte
- la dégénérescence maculaire liée à l’âge
- le glaucome
- la rétinopathie diabétique
- l’opacification cornéenne
- le trachome
L’OMS estime également que les principales causes de cécité sont:
- une cataracte non opérée: 35%
- des défauts de réfraction non corrigés: 21%
- un glaucome: 8%
On constate clairement que la grande majorité de ces afflictions sont dues à un manque de traitement et à des défauts non-corrigés. Ce qui fait confirme la volonté de lutte des acteurs internationaux.
D’un pays à l’autre, elles peuvent varier. À titre d’exemple, la part des déficiences visuelles imputables à la cataracte est plus élevée dans les pays à revenu faible ou intermédiaire que dans les pays à revenu plus élevé.
Dans les pays dits « développés », des maladies telles que la rétinopathie diabétique, le glaucome et la dégénérescence maculaire liée à l’âge sont, au contraire, plus courantes.
Une prévention dès le plus jeune âge
Comme vu précédemment, il n’y a pas d’âge pour développer une déficience visuelle. Le travail auprès d’eux en terme de santé visuelle mondiale est considérable, mais essentiel.
Les causes de la déficience visuelle chez l’enfant varient d’un pays à l’autre. Dans les pays en voie de développement, la cataracte congénitale est l’une des principales causes, tandis que dans les pays à revenu plus élevé, la rétinopathie du prématuré est plus fréquente.
C’est surtout le sur-développement de la myopie au fil des années qui inquiète. En Asie, on la mentionne de plus en plus comme une épidémie. Là encore, le manque de contrôle dès le plus jeune âge tend à aggraver la situation.
En France, 7 parents sur 10 pensent que le contrôle de la vue n’est nécessaire qu’après 3 ans. La première consultation ophtalmologique de l’enfant, lors d’un contrôle de routine, est en nette régression : 39% en 2019 contre 55% en 2013
Le mode de vie numérique du XXIème siècle est aussi passé par là. Les rayons ultraviolets et la lumière bleue des écrans, consultés à longueur de journée, vont considérablement éloigner toute amélioration.
Quelle stratégie adopter ?
Pour prévenir la majorité des déficiences visuelles, évitables à près de 80%, il faut être en mesure de pratiquer des interventions et faire de la sensibilisation. Un plan mondial a été mis en place par l’OMS. Ce plan, adopté en 2013 à l’Assemblée Mondiale de la Santé, permet d’élaborer des outils pour évaluer les prestations de services dans tous les pays.
Ce plan vise notamment l’évaluation des services de santé oculaire mais aussi du diabète, pour prévenir de la rétinopathie diabétique, et de la rééducation de la vue pour ceux dont la déficience pourrait s’avérer irréversible.
À l’heure actuelle, l’OMS est également en train d’établir un rapport mondial sur la vision. Ce dernier doit proposer des recommandations pour garantir des soins oculaires complets et intégrés dans les pays. Ledit rapport devrait également contribuer à façonner un programme mondial d’action pour la vision, tout en aidant les États membres à réduire la charge des maladies oculaires, en améliorant la vie des personnes atteintes de déficience oculaire afin d’atteindre les objectifs de développement durable fixés.