Histoires d’opticiens : Ambre Garcia, Girlboss
Dans le petit monde de l’optique, les talents ne sont pas rares, et les histoires d’opticiens sont souvent étonnantes. Ambre Garcia a vu son parcours jonché de bonnes comme de mauvaises expériences. Elle a su toutes les mettre à profit pour s’engager dans une démarche entrepreneuriale originale, dans laquelle l’innovation et le dépassement de soi sont les principaux moteurs. Elle n’oublie pas non plus toutes les rencontres qui ont fait d’elle l’opticienne qu’elle est aujourd’hui. Interview.
Histoires d’opticiens : Ambre Garcia, un parcours ponctué de rencontres
Bonjour Ambre, et merci de répondre à nos questions. Pouvez-vous nous décrire en quelques mots votre parcours ?
J’ai obtenu avec tout juste la moyenne un BTS OL à l’ISO Toulouse en alternance dans une grande enseigne. J’ai été réorientée dès la première année par mes professeurs et encouragée par ma première directrice en optique, Isabelle Pascual, une femme que je n’oublierais jamais, une pro du « leadership« . Si j’ai continué mon cursus dans le monde de l’optique, c’est grâce à elle.
J’ai décidé de partir de cette enseigne qui avait fortement changé et au sein de laquelle je ne me retrouvais plus. À partir de là, avec Damien Miglietta alias « le fou de la lunette », nous avons créé notre propre enseigne Désir d’y voir en 2011. Damien avait eu la chance, à l’époque, de travailler aux cotés de la famille Lebrati, que nous saluons chaleureusement.
Désir d’y Voir est un concept différenciant dans le monde de l’optique, qui se développe sous forme de franchise depuis 2017 à Mérignac, Bordeaux, Andernos, Arcachon et Toulouse avec un atelier de création propre à chaque professionnel qui l’intègre.
Aujourd’hui j’ai la « casquette » de Présidente du Groupe DYV avec plusieurs sociétés a son actif toutes liées au monde de l’optique pour le moment.
Le désir d’y voir…et d’innover
Nous avions eu l’occasion de parler du concept Eyes Corner sur notre blog. Pouvez-vous nous raconter comment vous est venue cette idée, et quel bilan vous en faites plusieurs années après son lancement ?
Eyes Corner est né d’une agression en magasin. Le service, c’est ce qui m’anime en tant qu’opticienne, mais avec cette mauvaise aventure, je n’y arrivais plus. J’avais clairement la peur au ventre.
J’ai donc eu l’idée de me « mettre en boite » et le concept de l’optique à emporter a vu le jour sous forme de distributeur automatique moderne, technologique et fabriqué en France. Le lancement a dépassé mes attentes et les frontières, de grosses sociétés se sont et s’intéressent encore au projet.
Le plus dur dans ce projet, ce sont les emplacements. Cela fonctionne par appel d’offre. J’essaie donc de faire entendre qu’il s’agit d’un service avant tout.
Le modèle ‘Grand Passage’ dont vous aviez parlé est en Gare de Nice pour 3 ans depuis Septembre 2020 et une version vitrine pour les opticiens se trouve au magasin Désir d’y Voir de Bordeaux depuis Octobre 2019. J’ai fini par m’auto-implanter, « fermez-moi les portes, je passe par la fenêtre ! «
Ces deux versions sont très appréciées par le consommateur. Les entendre fredonner « Optic to go, optic to go… », c’est une fierté.
La version vitrine a été un véritable atout pendant le confinement et a permis au service de se faire connaitre. Eyes Corner est une marque qui peut et doit être valorisée à l’échelle mondiale.
Des histoires d’opticiens qui s’écrivent en équipe
Avec Damien Miglietta, l’enseigne Désir d’y voir a également lancé le coffret Begloo by Migloo. Pouvez-vous nous parler de cette aventure ?
Begloo By Migloo est né grâce à une cliente que nous apprécions particulièrement, et qui a lancé un défi à Damien Miglietta. Elle désirait des lunettes de poche pour le restaurant. Nous aimons le challenge, alors le produit est devenu une société et a été présenté à Dubaï avec un franc succès.
Séduit par le coffret de lecture, les commandes ont été exponentielles. Il a été également repéré et mis en avant par le grand chef Thierry Marx lors d’Equiphotel, en étant finaliste « innovation de l’année en service pour les hotels et restaurants ».
D’autres innovations sont-elles à prévoir ?
« Le LAB – Creative House » a ouvert ses portes il y a quelques jours. Il s’agit un « open-space » pour imaginer, innover et créer. C’est la continuité et la suite logique de ce que nous entreprenons avec Damien.
Le but est de remettre au goût du jour le savoir-faire français, partager nos expériences sur l’entrepreneuriat, moderniser et donner un coup de souffle à cette profession qui en a fortement besoin. L’entrepreneuriat c’est mon adrénaline, il y a d’autres projets à venir, avec le seul but de garder le cap sur ceux qui existent déjà.
Une communication spontanée…
Votre communication, sur les réseaux notamment, ne ressemble pas à celle, parfois classique, des autres acteurs de l’optique. Est-ce quelque chose que vous préparez beaucoup en amont, ou vous êtes plutôt du genre « spontanée » ?
Je n’ai fait aucune étude de communication et cela se voit surtout lorsque je pousse des « coups de gueules ». Sur les réseaux sociaux, je suis comme dans la vie de tous les jours, très spontanée. Dans le monde de l’optique, il y a tant à faire mais je regrette que certains messieurs remplis de testostérone restent dans leurs petites pantoufles.
Je ne pense pas me tromper en vous disant que je suis autodidacte sur la communication, je perçois les réseaux sociaux en vogue avant les autres opticiens et je surfe dessus, je teste et je vois si cela prend et je fonce. Depuis 2011, je travaille le #desirdyvoir. Je n’ai jamais sponsorisé une de mes publications, je teste l’algorithme sur chacune d’entre elles et retiens ce qui fonctionne.
Je ne désire pas payer pour augmenter ma visibilité car je trouve que cela fausse la donne. Cela fait marcher l’économie du DATA mais d’une manière non naturelle. J’ai tout récemment supprimé mon compte perso sur Instagram (que j’utilisais de façon professionnelle) pour me consacrer aux comptes du Groupe DYV (@desirdyvoir @eyescorner @lelab_house et @begloobymigloo.)
…et féministe
Vous communiquez également beaucoup sur l’entrepreneuriat des femmes, via le hashtag #girlboss. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Le Groupe DYV est majoritairement féminin avec 75% de femmes. Je suis une féministe dans l’âme. Nous pouvons et nous devons faire ce qui nous anime en additionnant les plaisirs. J’ai eu mon premier enfant à 23 ans cela ne m’a pas empêché d’être une cheffe d’entreprise.
Je regrette que la société ait tendance à nous freiner, particulièrement lorsqu’on est une femme. Pour autant, je ne souhaite pas forcément surfer sur la vague des femmes qui s’entraident. D’autres le font mieux que moi sur les réseaux. On entend beaucoup parler de tout cela mais malheureusement, peu de choses sont appliquées car elles sont difficiles à mettre en œuvre.
Mais je garde espoir de me faire entendre, et c’est pour cela que j’utilise le hashtag #girlboss sur les réseaux sociaux.
Un secteur prometteur mais qui tarde à évoluer
Quel regard portez-vous sur le secteur de l’optique aujourd’hui ?
Il y a énormément à faire, mais il existe encore beaucoup de personnes réfractaires avec une vision un peu archaïque. De nombreux opticiens n’ont aucune nouvelle vision afin d’améliorer le monde de l’optique et je le regrette profondément.
Malheureusement, la crise sanitaire ne va pas arranger les choses. Les magasins d’indépendants passionnés vont connaître des difficultés à rester sur le marché. C’est bien triste car s’il y a des personnes à sauver de cette crise économique — et ce n’est que mon opinion —, ce sont les personnes qui possèdent un savoir-faire et de vraies valeurs pour la profession.
Garder une vision optimiste du monde de l’optique pour continuer à « casser les codes », c’est la chose la plus importante pour redonner confiance aux clients sur notre profession. Il faut être à l’écoute des besoins, et non de son portefeuille ou de ses remboursements mutuelles.
Un grand merci à Ambre Garcia pour avoir répondu à nos questions. À très vite pour de nouvelles histoires d’opticiens !